Adrien Pichoud Chief Economist & Senior Portfolio Manager
Fabrizio Quirighetti Macroeconomic Strategist
Maurice Harari Senior Portfolio Manager
Christophe Buttigieg Portfolio Manager
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Etats-Unis - La Fed opère un virage sans précédent

Le virage opéré par la Fed en l’espace de six mois est pour le moins spectaculaire, voire sans précédent.

Début octobre 2018, la Fed venait tout juste de relever son taux directeur pour la septième fois en deux ans. Les membres du FOMC s’attendaient à ce que les taux soient rehaussés trois fois en 2019 et encore une fois en 2020, après la hausse prévue en décembre 2018. Le président de la Fed Jerome Powell indiquait alors que le taux des Fed Funds était encore «loin d’un niveau neutre» et s’apprêtait à faire passer le processus de réduction systématique du bilan de la banque centrale américaine en mode automatique.

En mars 2019 toutefois, après une série de discours augurant d’une approche plus accommodante, la Fed a définitivement mis un coup d’arrêt au resserrement de sa politique monétaire. Les membres du FOMC ont non seulement indiqué ne plus s’attendre pratiquement à relever les taux à court terme au cours des trois ans à venir, mais ils ont également jugé que le taux des Fed Funds a quasiment atteint son niveau de neutralité à long terme. Pour couronner le tout, la Fed a annoncé que la réduction de la taille de son bilan prendra fin d’ici septembre.

Dès lors, les outils de politique monétaire sont désormais mis en veille et l’approche de la Fed est résolument neutre, sans penchant en faveur d’un assouplissement ni d’un resserrement, et prête à être ajustée au besoin. Dans un contexte où les craintes vis-à-vis de la croissance mondiale continuent de l’emporter, les marchés à terme n’ont guère tardé à intégrer la perspective d’une baisse des taux cette année ou l’an prochain.

La Fed suspend la hausse des taux. Les marchés anticipent désormais une baisse des taux

Sources: Réserve fédérale américaine, Bloomberg. Données au: 05.04.2019

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Les taux allemands à 10 ans sont repassés en territoire négatif

Sources: Bloomberg, SYZ Asset Management. Données au: 05.04.2019

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Zone euro – Les taux allemands à 10 ans repassent en territoire négatif, avec l’assentiment de la BCE

Un tel événement n’était pas censé se produire en premier lieu et n’était certainement pas censé se produire une deuxième fois. Et pourtant, les taux allemands à 10 ans sont bel et bien retombés en territoire négatif en mars.

La combinaison de facteurs était puissante: ralentissement continu de l’activité à travers la région, révision en baisse des prévisions de croissance et d’inflation de la BCE avant l’annonce d’un taux d’inflation plus faible qu’attendu, baisse des taux internationaux face au ton étonnamment conciliant de la Fed, et éventualité d’un taux de dépôt modulé pour atténuer l’impact de taux à court terme négatifs sur la rentabilité des banques, perçue comme un signe indiquant que la BCE a renoncé au relèvement de ses taux.

Dans ce contexte, l’aplatissement de la courbe européenne, mesurant l’écart entre les taux à long terme et ceux à court terme ne semble guère surprenant, d’autant que les anticipations d’inflation à moyen terme retrouvent également leurs plus bas de 2016. La «japonisation» de l’Europe est engagée.

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Royaume-Uni – L’économie cale alors que les parlementaires continuent de débattre

Le Royaume-Uni et l’Union européenne jouent la prolongation après avoir repoussé à deux reprises la date du 29 mars initialement prévue pour le Brexit.

En mars, le risque d’une sortie sans accord et l’impact que ce scénario pourrait avoir sur l’activité économique de part et d’autre de la Manche, et de la frontière irlandaise, ont suscité des craintes grandissantes. Les données publiées en mars font état d’une économie au point mort, avec une contraction de l’activité dans le secteur des services et un secteur manufacturier stimulé uniquement par l’accumulation de stocks pour parer à de possibles perturbations de la chaîne d’approvisionnement.

Les gesticulations politiques, les stratégies alambiquées et les luttes d’influence au parlement britannique ne semblent connaître aucune limite. Mais l’impact économique de l’incertitude persistante qui entoure les futures relations commerciales entre le Royaume-Uni et l’UE pourrait bientôt forcer la main des responsables politiques. Faute de quoi, le scénario tant redouté d’une récession induite par le Brexit pourrait bien se concrétiser… même si ce dernier n’a pas effectivement eu lieu.

L’économie britannique cale face à l’incertitude qui entoure le Brexit

Sources: Factset, SYZ Asset Management. Données au: 05.04.2019

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La reprise du secteur manufacturier chinois fait suite à d’importantes mesures de soutien monétaire et budgétaire

Sources: Factset, SYZ Asset Management. Données au: 05.04.2019

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Chine – Des signes de reprise encourageants attendus de longue date

L’économie chinoise semble reprendre des couleurs en 2019, ce qui est sans conteste une bonne nouvelle en ce qui concerne les perspectives de l’économie mondiale. Alors que la dynamique s’essouffle aux Etats-Unis face à la disparition du soutien budgétaire et que l’Europe s’enlise dans le marasme, les signes encourageants que donne la deuxième puissance économique mondiale sont plus que bienvenus après le ralentissement prononcé que le pays connaissait depuis un an.

La reprise de l’activité industrielle chinoise en mars, repassée en territoire expansionniste et au plus haut depuis le printemps dernier, démontre ainsi que les mesures d’assouplissement monétaire et budgétaire mises en œuvre ces derniers trimestres ont progressivement l’effet escompté. En premier lieu, elles compensent le resserrement excessif des conditions de crédit intervenu en 2017, lequel a pesé sur la croissance du crédit l’an dernier. En second lieu, elles ont assuré la stabilisation de l’économie au plan intérieur avant que l’impact de la hausse des droits de douane américains ne fasse pleinement sentir ses effets début 2019.

Les négociations commerciales entre les Etats-Unis et la Chine semblent avancer et pourraient conduire à un accord sous une forme ou une autre. Le redressement de la demande finale chinoise sera toutefois essentiel pour éviter que la croissance mondiale ne cède sous la pression des difficultés auxquelles l’Europe est confrontée et du moindre élan qu’affiche l’économie américaine.

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Allemagne – Enfin un redressement de l’indice Ifo du climat des affaires

Après six mois de recul ininterrompu, l’indice Ifo du climat des affaires en Allemagne s’est redressé en mars. En dépit des prévisions des analystes qui tablaient sur un niveau inchangé et des chiffres décevants de l’indice PMI «flash» publiés au début du mois, l’indice a grimpé de 98,7 à 99,6. Cette embellie s’explique essentiellement par la hausse de l’indice des anticipations, qui a gagné 1,6 point pour atteindre 95,6. Cette hausse laisse entrevoir une stabilisation de l’économie allemande au deuxième semestre. Le secteur des services a enregistré une solide reprise avec un gain de 4,7 points, tandis que le secteur manufacturier est resté déprimé avec une baisse de 2,5 points. Ce recul reflète l’évolution de l’indice PMI manufacturier, qui a atteint son niveau le plus bas depuis 2012, à 44,7.

Bien que ces enquêtes indiquent que la tendance du secteur manufacturier reste négative, les données encourageantes sur le front intérieur – comme en témoigne l’indice Ifo – pourraient annoncer de meilleures perspectives pour le deuxième trimestre de cette année.

Enquête Ifo allemande sur le climat des affaires

Sources: Bloomberg, SYZ Asset Management. Données au: 31.03.2019

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La banque centrale de Norvège a relevé ses taux

Sources: Bloomberg, SYZ Asset Management. Données au: 29.03.2018

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Norvège – La banque centrale relève ses taux

Dans un contexte de faible croissance, d’inflation anémique et de maintien de taux bas pour une période prolongée, la Norvège se démarque des principales économies développées. Le 21 mars, la banque centrale norvégienne a rehaussé son taux directeur de 25 pb à 1,0%.

L’économie du pays connaît une solide croissance, avec une hausse de 0,9% au quatrième trimestre 2018, et une augmentation de 2,7% est attendue cette année. Par ailleurs, l’indice PMI se maintient au-delà des 55 points depuis août dernier et l’inflation s’est montrée plus forte que prévu en février, à 3,0% et 2,6% pour l’inflation totale et l’inflation sous-jacente respectivement, par rapport à un objectif de 2,0%. Le gouverneur de la banque centrale de Norvège Øystein Olsen a ainsi indiqué que «les perspectives et l’équilibre des risques suggèrent que le taux directeur sera très probablement rehaussé à nouveau lors du prochain semestre.»

Soucieuse de ne pas maintenir trop longtemps ses taux à un niveau excessivement bas, la Norges Bank fait face à un dilemme auquel les autres grandes banques centrales rêveraient d’être confrontées.

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Taux – Inversion temporaire de l’écart entre les taux américains à 3 mois et ceux à 10 ans?

L’écart entre les taux américains à 3 mois et ceux à 10 ans s’est inversé en mars. Ce n’est toutefois pas le cas de l’écart entre les taux à 2 et à 10 ans, qui constitue un indicateur plus fiable de l’imminence d’une récession et qui s’établit à 15 pb. L’inversion du segment 3 mois-10 ans tient essentiellement au ton plus conciliant adopté par la Fed et au caractère décevant de certaines données sur l’activité manufacturière en Europe, qui ont induit un repli sur les valeurs refuges et entraîné une baisse de 31 pb du rendement des bons du Trésor américain à 10 ans le mois dernier.

Une telle inversion de la courbe des taux est généralement un indicateur avancé pour l’économie américaine qui tend à annoncer une récession à un horizon de 12 à 18 mois, bien que ce ne soit pas toujours le cas. Les acteurs du marché sont bien conscients du fait que le cycle économique touche à sa fin aux Etats-Unis et qu’une récession aura lieu à un certain moment. Il est cependant plus difficile d’en prédire la date à la suite d’une inversion de la courbe des taux. De plus, les marchés devront voir si cette inversion perdure, s’enfonce davantage en territoire négatif et se propage au segment 2 à 10 ans de la courbe. Par le passé, la courbe des taux s’est parfois inversée brièvement sans qu’une récession ne s’ensuive.

Enfin, la période prolongée de politiques monétaires inédites et ultra-accommodantes a naturellement engendré un aplatissement de la courbe et il pourrait être périlleux de tenter d’établir des comparaisons historiques.

Ecart entre les taux américains à 3 mois et ceux à 10 ans (pb)

Sources: Bloomberg, SYZ Asset Management. Données au: 08.04.2019

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Performance YTD des indices Philadelphia Stock Exchange Semiconductor et Nasdaq (sur une base 100)

Sources: Bloomberg, SYZ Asset Management. Données au: 09.04.2019

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Actions – Le secteur des semi-conducteurs au plus haut

L’indice Philadelphia Stock Exchange Semiconductor (SOX) reproduit la performance de 30 sociétés impliquées dans la conception, la distribution, la fabrication et la vente de semi-conducteurs. Au premier trimestre, l’indice a rebondi de 21,4% et a surperformé le Nasdaq de 4,6%.

Le secteur des semi-conducteurs s’était fortement replié au quatrième trimestre 2018, principalement sous l’effet d’une demande de composants électroniques inférieure aux attentes. Depuis le début de l’année toutefois, les acteurs du secteur prédisent une stabilisation aux alentours du deuxième trimestre et tablent sur un puissant rebond de la demande au deuxième semestre. Qui plus est, depuis le virage pris par la Réserve fédérale américaine sur sa politique monétaire en janvier, et face à l’apaisement des tensions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine, le secteur de la technologie (constitué de valeurs de croissance) se classe parmi ceux les plus performants jusqu’ici en 2019.

L’indice SOX a dernièrement atteint un nouveau plus haut record et a effacé la baisse de 15% enregistrée au quatrième trimestre 2018.

Alors que nous entamons la saison des résultats du premier trimestre, il sera intéressant de voir si le sentiment vis-à-vis du deuxième semestre reste positif. Tout signe de doute pourrait entraîner une correction de certains titres du secteur.

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Turquie – Forte pression sur la liquidité de la livre

Le taux au jour le jour implicite USDTRY s’est envolé de plus de 700% pour atteindre 1300% suite à l’arrêt par les banques turques de leurs prêts de livres sur le marché offshore. Suite au plongeon de la livre, qui a perdu 5% en l’espace d’un jour, il semble que les autorités turques aient tenté de stabiliser la monnaie à l’approche des élections municipales en empêchant la vente à découvert de la part des investisseurs. Cette mesure a mis sous pression certaines banques étrangères placées dans l’impossibilité de clôturer leurs positions en swaps de change. Le taux au jour le jour est revenu à un niveau proche de la normale les jours suivants. Cependant, cet événement a une fois encore sapé la confiance des investisseurs à l’égard des actifs turcs et pourrait affecter la liquidité du marché offshore à l’avenir. Les craintes des investisseurs se sont notamment reflétées dans l’envolée des CDS sur la dette turque, qui ont augmenté de 134 pb sur le mois.

Le taux de la livre turque sur le marché offshore s’est envolé

Sources: Bloomberg, SYZ Asset Management. Données au: 08.04.2019

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Les cours du pétrole ont démarré 2019 en beauté

Sources: Bloomberg, SYZ Asset Management. Données au: 08.04.2019

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Matières premières – Le grand retour du pétrole?

Si les marchés actions ont enregistré une reprise en «V» spectaculaire et quelque peu inattendue au premier trimestre, avec la meilleure performance trimestrielle de l’indice S&P 500 depuis le 2e trimestre 2009, le rebond des prix de l’énergie s’est montré tout aussi exceptionnel, sinon plus, avec un gain de 5,1% du brut léger américain et de 3,6% du Brent en mars. Les cours du pétrole affichent ainsi une hausse de 30% sur l’année en cours, signant leur meilleur début d’année depuis 2002. Ce rebond tient à la réduction de l’offre de l’OPEP, à la baisse de la production au Venezuela et au ton conciliant adopté par les banques centrales pour tenter d’apaiser les craintes d’une récession mondiale.

La situation sur le front de la demande ne montre toujours aucun signe concret d’amélioration, mais le sentiment à l’égard de la croissance mondiale et des échanges commerciaux s’est raffermi depuis la fin de l’an dernier. Les prix des métaux industriels ont eux aussi rebondi et l’indice Baltic Dry s’est enfin stabilisé. Un long chemin reste toutefois à parcourir avant de pouvoir crier victoire.